Nuit agitée dans le bus, nous avons du mal à trouver le sommeil, les images de l'agression nous reviennent sans cesse, le malaise persiste. Douze heures plus tard, à 7h du matin, nous sommes soulagés d'arriver enfin à São Luis. Fatigués, nous ne cherchons même pas à prendre un bus et rejoignons en taxi un hôtel du centre-ville. Nous y croisons avec plaisir Maki, la voyageuse japonaise qui était avec nous en Amazonie (elle nous a également confié s'être fait arracher des mains son appareil photo à Rio, tiens, ça nous rappelle quelque chose...).
Allez, on va se coucher pour récupérer un peu et oublier tout cela. Réveil à 13h après un sommeil réparateur, notre bonne humeur refait lentement mais sûrement surface. Nous hésitons à racheter ou non un petit appareil photo, sachant que nous risquons une fois encore de nous le faire braquer, mais il est difficile également de ne prendre aucune photo (et pas question de se servir de l'appareil d'O'Live au Brésil, du moins en ville). On tranche en décidant d'en racheter un, mais le plus petit et le moins cher possible, ni de qualité ni de marque. De toute façon nous n'avons ni les moyens (l'électronique, de plus, est beaucoup plus cher qu'en France ici) ni l'envie de mettre de l'argent là -dedans, donc ne vous étonnez pas si le nombre des photos des étapes brésiliennes et surtout leur qualité ne sont pas au rendez-vous, la sécurité d'abord !!!
Nous passons l'après-midi à comparer les prix puis à nous décider dans un grand shopping que l'on nous a indiqué, puis rentrons tôt. Allez, l'incident est clos et notre bonne humeur et goût pour le voyage reviennent.
Le lendemain, nous n'avons pas envie de rester en ville et décidons d'explorer un peu les environs, direction la presqu'île d'Alcântara. Un petit bateau nous conduit vers ce lieu devenu presque fantôme aujourd'hui.
En arrivant, nous nous joignons à un groupe de vacanciers brésiliens qui partent visiter l'île ; les informations sont données en portugais mais bon, nous ferons avec. Il fait bon flâner parmi les petites ruelles aux pavés inégaux de cette ville de caractère, à la recherche des plus belles maisons colorées aux toits de tuile rouges et des ruines témoignant de l'ancienne noblesse et richesse que connut ce lieu...
L'endroit dégage le charme d'une ville qui s'est endormie après avoir connu son heure de gloire il y a bien longtemps, au dix-huitième siècle. Alcântara, enrichie grâce à la canne à sucre et au coton, était alors plus importante que que São Luis, mais l'abolition de l'esclavage en 1888 et la crise du sucre lui furent fatal et elle tomba petit à petit en décrépitude.
Pourtant les traces de noblesse et de richesse demeurent encore visibles, comme en témoignent par exemple les ruines de la casa do Imperador. Suite au désir de l'empereur Pierre II de venir à Alcântara, deux seigneurs construisirent une maison en son honneur. Mais comme tous deux se disputaient le droit de recevoir en priorité l'empereur, celui-ci mit tout le monde d'accord en annulant simplement son voyage et la maison ne fût jalais achevée... La ville est ainsi emplie d'histoire de riches seigneurs, et ruines, musées et églises se succèdent.
Sur la place principale demeure encore le pelourinho, le pilori où l'on fouettait les esclaves, le dernier existant encore de nos jours. Ca fait froid dans le dos...
Cette journée nous a bien plu et détendu, nous rentrons tranquillement à São Luis en fin d'après-midi, non sans observer quelques magnifiques dauphins et oiseaux rouges vifs depuis le bateau ! Les rues de São Luis sont déjà quasimment désertes alors qu'il est loin de faire nuit, tout ferme étonnament tôt ici ; nous passons la soirée à l'hôtel après avoir réservé une excursion pour nous rendre au parc de Lençóis Maranhenses demain.
Dur dur le réveil à 5h pour prendre un bus à 5h30 direction Barreirinhas, porte d'entrée du parc national de Lençois Maranhenses. Mais le seul moyen si l'on souhaite visiter ce parc en une journée et rentrer le soir à São Luis consiste à partir très tôt. Nous arrivons vers 9h30 à Barreirinhas et grimpons dans un gros 4x4 (aux énormes roues, ce ne sera pas un luxe !) qui slalome entre les dunes et les rivières pendant presque une heure de voyage cahotique et magnifique, jusqu'à nous déposer à l'orée de dunes d'un blanc aveuglant s'étendant à perte de vue...
Les paysages sont enchanteurs et le parc porte admirablement son nom (lençois signifiant draps en portugais), ce lieu nous donne exactement cette impression que des centaines de draps immaculés flottent dans les airs à perte de vue... Les dunes, entrecoupées de mangroves et de lagunes d'eau douce (refuges d'espèces de tortues en voie de disparition et d'oiseaux migrateurs) ondulent ainsi sur plus de 1500 ha. Dommage que nous ne soyons qu'au début de la saison des pluies et que ces lagunes soient encore presque asséchées. D'ici quelques mois, la vue de ces nappes d'eau d'une couleur bleûtée s'étendant à perte de vue au milieu de ces dunes d'une blancheur infinie constitueront l'un des plus beaux spectacles qu'offre le Brésil...
Néanmoins nous apercevons déjà quelques belles lagunes et, après une marche de 30 min sur le sable doux, chaud et aveuglant qui compose ces paysages grandioses, nous parvenons à la lagune des pêcheurs. Par cette chaleur, plonger dans l'eau est inestimable !!! Quelles vues ici, les lieux sont tout simplement beaux... Plus tard nous nous égarons parmi d'autres dunes pour rentrer par un autre chemin, imaginant l'immensité de ce parc et de ces paysages inviolés...
Il est encore tôt lorsque nous retrouvons Barreirinhas et le bus pour São Luis ne sera là qu'à 17h, ce qui nous laisse le temps d'observer l'artisanat local et de nous occuper sur internet. Puis c'est reparti pour 4h de trajet dans l'autre sens, mais la beauté des paysages valait largement ce détour.
Le jour suivant nous nous renseignons pour rejoindre Fortaleza à ... pas moins de 18h de bus !!! Le pays est immense et les distances énormes, ici il est tout à fait normal et courant d'acheter un billet pour 30 heures de route... Les bus sont chers et, à notre avis, il n'y a pas assez de différence de prix avec les vols aériens proposés par les compagnies locales à bas prix (du moins pour certaines destinations) pour justifier le temps perdu et la fatigue. Nous choisissons donc l'avion ; ouf, il reste de la place pour un vol bon marché en début de soirée !
En attendant nous n'avons toujours pas visité la ville de São Luis, pourtant réputée comme l'une des villes coloniales les mieux préservée du pays. C'est vrai que son centre historique, intact, présente une belle harmonie architecturale. Les azulejos des façades des maisons bourgeoises, les toits en tuile, quelques belles églises se découvrent au hasard des chemins. Pourtant il faut dire également que la ville est assez mal-famée et, si l'on s'y sent à peu près en sécurité dans les grandes artères, nous préférons ne pas trop nous aventurer dans les petites ruelles plus désertes, ni prendre de photos. C'est donc une visite très rapide et incomplète que nous en effectuons.
Nous passons la fin d'après-midi sur internet puis à réfléchir à la suite de notre itinéraire au Brésil, décidant de le modifier en grande partie. Nous en avons assez des grandes villes peu sûres où l'on ne peut pas sortir après 17h sans risques, et décidons de n'aller ni à Recife ni à Salvador da Bahia (pourtant réputée comme l'une des villes à l'ambiance les plus envoûtantes du Brésil, mais tant pis) et de privilégier le sud du pays, beaucoup plus sûr, les bords de mer plus tranquilles, le nord de l'Argentine et peut-être l'Uruguay, à voir. Franchement, nous n'avons pas envie (c'est sûrement en lien avec l'agression bien sûr) d'aller dans des endroits où le climat d'insécurité gâche franchement le plaisir, et la nature nous attire bien plus que les grandes mégalopoles... Nous maintenons bien sûr Rio de Janeiro (ça a l'air trop beau !!!) et, par curiosité, ajoutons une courte escale à Brasilia (nous visiterons sûrement certains sites de ces deux villes via une agence). Et oui, nous changeons un peu notre manière de voyager (au Brésil seulement, les autres pays d'Amérique du Sud sont bien plus sûrs dans l'ensemble) pour nous sentir plus sereins.
En attendant direction Fortaleza (non pour la ville mais pour les plages du littoral du Ceará) que nous rejoignons vers 20h après une heure trente de vol (bien mieux que 18h de bus !!!).