Notre dernière nuit de bus de ce voyage... Difficile de l'oublier car la route entre Cusco et Nazca, toute en lacets, est plutôt éprouvante et longue ! Heureusement, elle est désormais asphaltée et les bus sont confortables. A notre arrivée, tôt le matin, les nuages sont bien présents au dessus de la ville, espérons que cela se dégagera pour que nous puissions survoler les célèbres lignes de Nazca.
Nous nous installons dans un petit hôtel et partons nous renseigner auprès des nombreuses agences de cette ville dédiée exclusivement au tourisme. Apparemment il y a toujours des nuages ici le matin et les avions ne décollent qu'à partir de 10h ou parfois, comme hier où le temps ne s'est pas dégagé, ne décollent pas du tout... Du coup les listes d'attente pour voler sont longues, mieux vaut prévoir de rester deux ou trois jours au cas où le ciel serait capricieux. Tout est pris aujourd'hui mais une agence nous met en tête de liste pour les vols demain matin, nous verrons bien...
La journée n'est pas perdue pour autant, nous profitons de notre après-midi pour visiter le cimetière de Chauchilla, cimetière préinca situé en plein milieu du désert. Le lieu est assez surréaliste. Des ossements, des morceaux de tissus et de chair jonchent le sable, mis à jour par le vent et les pilleurs de tombes. On se croirait directement plongé dans un film d'horreur.
Dans les quelques tombes de deux ou trois mètres de profondeur mises à jour, des momies nous fixent... Découvertes en 1957, ces momies de la culture icachincha, vieilles de 1000 ans, sont installées assises, dans la même position qu'elles ont été trouvées et placées à l'époque. Accompagnées de leurs enfants, de leurs esclaves et de céramiques qui étaient autant d'offrandes aux Dieux, elles sont admirablement conservées, disposées par trois au fond de tombes construites en briques de terre cuites. Le plus étonnant, c'est la position qu'elles ont toutes et leurs longs cheveux pouvant atteindre trois mètres de long, sans oublier le site, l'environnement psychédélique qui les entoure. Un endroit surprenant, fascinant.
Le ciel est gris le lendemain matin, le guide de l'agence auprès de laquelle nous avons réservé nos places ne vient nous chercher que vers 10h. A l'aérodrome, nous prenons notre mal en patience en compagnie de dizaines d'autres personnes, un peu inquiets car il faut savoir que quatre touristes sont morts ici au mois d'avril en survolant les lignes, leur avion s'étant écrasé. Alors, même si depuis tous les contrôles de sécurité ont eu lieu, il faut un peu de panache à l'idée de monter dans ces minuscules coucous... Un coin de ciel bleu apparaît, tout le monde s'active. Une demi-heure après le temps est resplendissant et c'est parti pour 35 minutes (court mais intense !) de vol au dessus de ces lignes énigmatiques.
Les lignes de Nazca constituent en effet l'une des énigmes majeures de notre époque. Il s'agit d'immenses figures géométriques ou représentant des animaux que leur taille (de 15 à 300 m de longueur pour les figures et jusqu'à 10 km pour certaines lignes) ne rend visibles que du ciel. Ces dessins immenses s'étalent ainsi au milieu du désert, figures emblématiques, mystérieuses, œuvre gigantesque qui fut élaborée (entre 300 av. Jésus-Christ et 800 de notre ère) minutieusement en écartant les cailloux et le sable sur 10 à 30 cm de profondeur et sur une largeur pouvant aller jusqu'à 3 m.
Vu du ciel, c'est tout simplement sensationnel. L'avion survole chaque dessin, clairement visible, l'un après l'autre, en se penchant sensiblement sur la droite puis sur la gauche. Depuis ce minuscule coucou, les sensations de vol sont décuplées et les lignes sont clairement identifiables, beaucoup plus que nous ne l'aurions pensé : condor, chien, araignée, baleine, astronaute, singe, perroquet, colibri, autant d'emblèmes dont le sens nous est encore inconnue.
En effet, aucune théorie satisfaisante n'explique aujourd'hui la signification de cet ouvrage gigantesque, un véritable casse-tête pour les scientifiques. Les explications les plus farfelues sont avancées : une piste d'atterrissage pour vaisseaux spatiaux extra-terrestres ? Le plus grand calendrier astral du monde ? Les lignes étant des chemins sacrés, les figures géométriques des lieux de culte et les figures animales des représentations des divinités ? Ou peut-être ces tracés s'intègrent-ils dans un rituel de culte de l'eau, vu l'importance de cet élément dans ce désert où il ne pleut que deux jours par an ? Les lignes correspondent-elles alors à des veines hydrauliques souterraines qui auraient été repérées par les anciens à l'aide de baguettes de sourciers ? Ou que penser des conclusions de Maria Reiche (qui consacra sa vie à étudier les lignes) qui affirme que les lignes droites correspondent aux couchers de soleil lors des solstices qui marquaient le début des cycles agricoles ?
Une polémique qui aura fait le tour du monde plusieurs fois, un mystère qui demeure entier... En tout cas, quelle que fut la raison de cet immense construction, elle devait être importante car le résultat est impressionnant. Les dessins traversent les collines sans que leur tracé n'en soit affecté, habillant ainsi le désert de figures stylisées et emblématiques comme le condor, l'oiseau-serpent et tant d'autres...
Malgré le coût du vol et sa courte durée, nous ne regrettons pas notre choix, c'est génial de survoler ainsi ces lignes ! Bien sûr, nous aurions pu nous contenter de nous rendre au mirador terrestre (que nous apercevons d'en haut) d'où il est possible d'observer trois lignes, mais c'est tellement mieux en avion. Merci pour ce moment riche en émotions !
Il est encore tôt quand nous rejoignons la petite ville de Nazca, ce qui nous laisse le temps de récupérer nos affaires à l'hôtel et de prendre un bus pour Ica, ville très proche de l'oasis de Huacachina, notre prochaine étape.